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Retour aux cheveux naturels, mon expérience

Mai 2007
C’était une belle journée d’été, à l’époque où être « naturelle » n’avait pas vraiment la cote à Montréal, et le big afro était bien  enterré dans les années 70, que ma sœur Laurie m’a demandé de l’accompagner pour se faire un Big Chop. Je n’en revenais pas de cette décision, je me disais « elle est folle! »
Moi, j’avais de beaux cheveux noir ébène
qui me tombaient sur les épaules. J’étais au salon de coiffure dominicaine chaque semaine et j’adorais en sortir et sentir mes cheveux qui bougeaient au gré du vent « comme les blancs »!!! 

Retournons plus loin en arrière, et là je m’expose!  Enfants, mes sœurs et moi on se faisait des concerts et moi j’avais toujours un bas collant sur la tête (oui, par-dessus les boules gogo!) et je faisais ma Willow Smith avec mes deux branches de looongs cheveux! En fait, maintenant que j’y pense, peu importe le jeu, j’avais « mes cheveux longs ». Je ne pouvais imaginer la vie autrement.

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Quand à 12 ans, pour mon entrée au secondaire, ma tante m’a brûlé euh, je veux dire défrisée chimiquement pour la première fois, je n’avais jamais été si heureuse! Ma mère avait tenté plusieurs fois le « repassage », mais enfant qu’on est, 2 minutes dehors et on revenait la « tête crotte » et tous les efforts de maman étaient gaspillés.

Donc! retour à cette fameuse journée de 2007, avant notre soirée  entre 4 soeurs au cinéma,  on est entré dans un salon au centre-ville d’une coiffeuse prétendant savoir s’occuper des cheveux naturels. Quelques minutes plus tard, Laurie est « devenue » Laurent, les larmes aux yeux et la rage au cœur du prix qu’elle avait payé simplement pour se faire raser la tête. Nous sommes allées au ciné, Laurie pleurant tout le trajet. Mes autres soeurs et moi n’osions pas dire grand-chose. Nous avons tenté de faire comme si de rien était. Les jours ont passé, les réactions de la famille et des amis étaient diverses.  Pas beaucoup de support, de l’étonnement et même des mauvais commentaires.
Puis, une transformation s’est faite. Le mini afro de Laurie s’est mis à pousser, elle y a mis un peu de gel et pan! Les belles bouclettes ont commencé à faire des jaloux. Tout le monde a oublié la tête à la garçonne qu’elle avait auparavant et les insultes et moqueries qu’elle avait subies. Laurie marchait la tête haute, très fière et tout le monde la complimentait.  Cette expérience m’a longtemps marquée. À une époque où presque tout le monde se défrisait à 1mm de repousse (moi la première), elle a décidé de faire quelque chose de complètement différent et en bout de ligne bien moins nocif pour la santé. Je l’ai toujours admirée en secret pour cet énorme pas de foi. Je disais toujours « ah ! j’aimerais ça avoir le courage de faire ça! » quand je voyais ses belles boucles. Mais en réalité, j’aimais beaucoup trop mes cheveux pour y mettre des ciseaux. Juste me faire couper les pointes aux 6 mois était un combat!
Fastfoward le 2 décembre 2011, mon autre sœur Lisa nous annonce qu’elle aussi elle se rase le coco. Faut comprendre que Lisa est la « hippie » de la famille : anti-Walmart, recyclage, voyage humanitaire, verte,  etc. Alors de sa part, c’était beaucoup moins étonnant.  Elle était si belle la tête rasée! Un autre choc pour moi. J’ai commencé à réfléchir à la possibilité moi aussi de ne plus être esclave du « creamy crack ». Mais non, c’est impossible pour moi à mon âge de me promener avec un nappy head, surtout au travail! Je voyais déjà les commentaires d’incompréhension ou d’ignorance de mon entourage. Je revoyais aussi ce que Laurie avait passé. Et non! J’avais travaillé fort pour que mes cheveux atteignent cette longueur, et je ne voulais pas recommencer! J’ai mis tout cela derrière moi.

D’une manière bizarre, le sujet est revenu me hanter sans que je puisse y faire quoi que ce soit. Je suis tout d’abord tombée sur un article qui disait qu’il était préférable de ne pas se défriser les cheveux lorsqu’on était enceinte, parce que le produit traverse les tissus de  la tête et se propage dans le sang, ce qui a pour effet très néfaste pour le bébé. Pour toutes les filles qui se sont défrisée, au nombre de brûlures qu’on a par traitement, en fin de compte ce n’est pas si étonnant. Ça m’a beaucoup fait réfléchir, car on essayait d'avoir des enfants, alors je me suis dit bon je n’aurai qu’à mettre des tresses pour la durée de ma grossesse, et j’ai passé à autre chose. Les mois ont passé, et j’ai un jour été dans un salon de coiffure réputé pour les noirs, simplement pour un lavage.  Alors que j’étais sous le séchoir avec mon wrap  (i miss those!!) la chose la plus affreuse est arrivée!
Une dame africaine très foncée (vous verrez l’importance de ce détail plus tard) est venue se faire défriser. La coiffeuse a appliqué le produit, et en attendant qu’il fasse effet, est allée terminer une autre cliente. Elle lui a demandé peut-être 1 ou deux fois si ça lui brûlait, mais sans jamais venir vérifier. Je vous promets les amis, que lorsqu’elle a été se laver la tête, les cheveux, qui lui arrivait presqu’aux épaules sont tombés dans l'évier. La coiffeuse est restée paralysée en voyant la grosse touffe de cheveux dans ses mains. La scène était digne d’une comédie romantique pas vraiment drôle. La cliente s’est rendue compte que quelque chose n’allait pas et elle a demandé ce qui se passait. La coiffeuse a simplement dit, « vos cheveux tombent madame. » Plus elle y touchait, plus les cheveux tombaient. À un tel point que quand la cliente s’est relevée, tout le contour de sa tête était blanc comme si on l’avait bleaché! Le contraste des couleurs était tel, je n’arrivais pas à y croire. Et pour ceux qui me connaissent vous savez qu’il n’y avait aucun moyen pour moi de cacher mon émotion sur mon visage.

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Le comble de cette histoire (et oui, c’est pas fini), c’est que le propriétaire, qui faisait les cheveux d’une autre cliente s’est comme fâché avec la cliente en lui disant « mais pourquoi vous l’avez pas dit que ça vous brûlait?! » elle a répondu qu’elle n’avait rien senti. Je me suis sentie tellement mal pour elle. Je ne pouvais pas imaginer ce qu’elle pouvait ressentir à ce moment-là. Et quelque chose m’a frappé : Jusqu’où suis-je prête à aller pour avoir les cheveux droits? À ce moment-là, comme toute personne de ma génération, je sors mon téléphone pour poster ce que je viens de voir sur mon facebook et quelle est la première nouvelle que j’y vois? Un article sur l’alopecie avec des photos plus que troublantes. Première cause? Le défrisant. Je suis restée dans l’étonnement et ma première pensée a été : « God are you trying to very subtily talk to me?! » Mais j’avais vraiment peur de ce que les gens penseraient si j’arrêtais le défrisant. Et mon mari! À ce moment-là, j’ai décidé que j’allais espacer mes retouches de "permanente". C’était au mois de mars 2012, et j’étais déjà « due » alors les semaines qui ont suivis ont été dures. Je ne savais pas quoi faire avec mes 2 textures, c’était impossible à dealer pour moi.. et on s’entend que j’avais peut-être un demi pouce de repousse là… j’étais en train de considérer laisser tomber quand…

J’ai vu le documentaire « Good hair » avec Chris Rock (tout le monde devrait le voir!) et ce soir-là, j’ai eu une discussion avec mon mari où je lui ai raconté ce que j’avais vu et la bataille intérieure que je vivais. Et là il m’a dit quelque chose de profond qui m’a marquée « Moi, je veux juste que tu sois en santé, et ce que je comprends de ce tu me dis, perm is disgusting! So just stop! Ill support you. Ensuite, il m’a fait réfléchir au message que je voulais passer à mes filles.  Est-ce que je veux qu’elles, comme moi, passent leur enfance à attendre d’être assez grandes pour se défriser, pensant qu’elle ne sont pas aussi belles parce que leur cheveux sont graines  crépus?

Certains d’entre vous ont sûrement vu cette expérience à la télé où ils ont fait une étude sur des enfants et leur ont présenté des poupées noires et blanches en leur demandant laquelle était plus belle? Les enfants noirs ont systématiquement choisi la poupée blanche! Pour plusieurs raisons bien sûre, mais aussi parce que les cheveux longs, lisses et droits, c’est ça la beauté. Ça m’arrache le cœur qu’on ne soit pas fière de nous au naturel. Pis là, je ne suis pas du genre black power et tout le kit, mais je pense qu’au minimum, on devrait s’accepter comme on est. L’afro fut un jour une grande fierté, mais au fil des années, cette fierté est devenue une honte et « inacceptable » si on veut réussir dans le monde des « blancs ». Says who?! Pourquoi on permet cela?
Toute cette réflexion m’a amenée à cette fameuse journée du 3 juin 2012 où, avec mes sœurs, cousines, ma mère, ma meilleure amie et mon mari on discutait allègrement du sujet après l’église chez ma mère. Tout à coup, Terry, l’homme d’action qu’il est se lève et dit : «Bon, je vais chercher les ciseaux, on coupe! » Mon cœur a fait le saut! Il est allé, et vraiment comme dans un film, je me suis assise et Terry a coupé ma queue de cheval au complet d’un seul coup. Les larmes ont commencé à couler! C’est comme si on coupait mon cœur! Après, il a dit bon ben on a pas le choix de raser maintenant! Et c’est ainsi que j’ai vécu mon BIG CHOP. Je suis contente que ce soit mon mari qui l’a fait et pas une étrangère. Avec du recul, je suis extrêmement contente d’avoir pris cette décision, mais cette semaine-là, j’ai pleuré à chaque soir. Et le pire, c’est quand j’ai réalisé que je devais aller travailler comme ça! J’ai paniqué, la veille j’ai tenté d’aller m’acheter une perruque… fail! Je trouvais que c’était trop laid sur moi. Je me suis donc résignée à aller travailler ainsi. Oh oui les commentaires ont plu… et je me sentais extrêmement à découvert, même vulnérable. Ça n’a pas été facile du tout. Certains amis me disaient qu’ils ne comprenaient pas ma décision, que j’avais déjà des cheveux à rendre jaloux. Quelqu’un m’a même dit que c’était pas « en forme »! ouch..

Plusieurs aussi ont essayé de me décourager et de me coller leur échec, disant que je n’y arriverais pas et que je retournerais au défrisant sous peu. Je l’avoue, je me suis cachée beaucoup sous des tresses. J’ai fait plusieurs essais de coiffures protectrices durant l’hiver, même a full weave and my God never again!! Mais le temps a passé et aujourd’hui, j’apprécie beaucoup ma nouvelle tête; la liberté et surtout les économies d’argent qu’elle me procure!
Sur mon chemin, j’ai rencontré du monde qui avait la même pensée que moi, notamment Katiana du salon Beauté naturelle antillaise qui est une perle! Elle m’en a appris beaucoup. Il y a aussi Wicelyne à Station beauté.  Mais je dois dire que ce qui a pesé le plus dans la balance, c’est l’appui de mon homme. Jamais je n’aurais pu passer au travers sans lui. Merci Terry! Ma maman et mes sœurs m’ont beaucoup encouragée aussi quand je voulais abandonner ou que je ne me sentais pas aussi belle qu’avec mes cheveux longs et droits.

Je voulais mettre par écrit mon expérience afin de ne pas oublier, mais aussi pour encourager une personne qui voudrait prendre une décision dont elle a peur. N’hésite pas à prendre cette décision qui te sera bénéfique à long terme, et qui en apprend énormément sur soi-même en fin de compte!

UPDATE DES DERNIÈRES ANNÉES

Le déménagement en Floride a grandement profité à mes cheveux, mais la venue de bébé m'a enlevé beaucoup de temps pour m'en occuper, ce qui fait que j'en fais des coiffures protectrices! Mais l'été venu, je prévoie laisser mes cheveux à l'air libre un peu plus.

Vous voulez me raconter votre "hair journey"?  Comment vous gérer le temps que ça prend s'occuper des cheveux naturels et avoir des enfants? Envoyez-moi un courriel ou partagez sur facebook!
À plus!
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